Programmes de recherche

Incidence des conditions de récolte sur les caractéristiques des produits élaborés

Contexte général

Au niveau de l’interface « récolte – transformation » depuis quelques années nous constatons une évolution des cahiers des charges définis par les élaborateurs (relèvement du niveau d’exigence concernant l’état sanitaire et la propreté des lots), ainsi qu’une diversification des pratiques des producteurs de pommes et des transformateurs.

Actuellement, il existe peu d’éléments techniques tangibles pour juger de la pertinence et des conséquences technologiques et organoleptiques des choix techniques effectués sur la pomme de sa chute à son entrée dans la râpe.

Afin d’y remédier, une réflexion sur les conséquences de l’évolution des pratiques de récolte a été engagée en 2006: comparaison des stratégies de récolte (incidence technologique et impact économique).

Sur ce thème, les missions de l’IFPC consistent à :

  • Apporter aux professionnels des informations leur permettant de choisir des stratégies de gestion de l’interface « arbre – râpe » adaptées à leur contexte
  • Proposer des outils d’aide à la décision : anticiper ou non la récolte, orienter les fruits vers différentes fabrications, raisonner la maturation complémentaire

Ce programme est décliné en 2 parties :

  • Effet des conditions de récolte et de stockage sur les caractéristiques des fruits à transformer, sur la composition des moûts et sur le cidre (début de l’action : récolte 2006)
  • Effet de la maturité sur la qualité du fruit à transformer. Etude préliminaire sur 2 variétés (début de l’action : récolte 2003) et création de groupes variétaux de comportement (début de l’action : récolte 2007 avec approche préliminaire en 2006)

Etude 1 : Influence des conditions de récolte et de stockage

Contexte

L’évolution des pratiques de récolte et de stockage des fruits a indéniablement une influence sur les caractéristiques des fruits à transformer. Mais actuellement il n’existe pas d’éléments techniques et objectifs permettant d’estimer les conséquences de ces nouvelles pratiques, l’objectif de ce projet est de combler ces lacunes.

Organisme pilote

IFPC : Rémi BAUDUIN – remi.bauduin@ifpc.eu et Yann GILLES - yann.gilles@ifpc.eu

Durée du programme

3 ans (2006-2008)

Objectifs

  • Acquérir des références sur la qualité sanitaire des fruits pour différentes stratégies (existantes ou innovantes) de récolte et de stockage en interaction avec la maturation post-récolte.
  • Etudier l’impact organoleptique des différentes stratégies de récolte et de stockage des fruits (y compris la qualité du tri) sur les produits transformés

Principaux résultats obtenus à ce jour

Etat sanitaire des fruits

Les essais 2007-2008 confirment les observations obtenues en 2006-2007, ce qui montre une bonne stabilité des observations et des conclusions.

Pour une maturation post-récolte de 7 jours, la récolte mécanique des fruits ayant un contact au sol < 1 jour (récolte réalisée dans la foulée d’un secouage de l’arbre) constitue une alternative intéressante en terme de qualité sanitaire des fruits avec 83 % de fruits sains avec un faible surcoût associé.

Pour une maturation post-récolte de 14 jours (taux de pectine soluble compatible avec une clarification pré-fermentaire par défécation), alors au regard du seul critère taux de « fruits sains », la récolte sur réceptacle constitue une alternative intéressante.

Flore des moûts

Les mesures montrent que le facteur influençant le plus la richesse de la flore du moût est l’état sanitaire des pommes : dans les moûts issus de pommes altérées, la flore est 100 à 500 fois plus importante que dans les moûts issus de pommes saines. Donc tout facteur dégradant l’état sanitaire des pommes (maturation post-récolte, mode de récolte, absence de tri avant pressage) va favoriser un innoculum important en toutes flores (bénéfique ou néfaste) du moût.

Patuline

On retrouve les résultats obtenus en 2006-2007 : dans les moûts de pommes saines, on ne détecte pas de patuline (<10µg/L) quelle que soit la variété, la durée de la maturation post-récolte et le mode de récolte. La patuline n’est détectée que dans les moûts issus de pommes altérées, dans ce cas, les teneurs « moyennes » sont de l’ordre de 500 µg/L. Il est à noter que les valeurs de patuline les plus élevées ne sont pas forcément détectées dans les pommes les plus altérées qui seraient naturellement triées i.e. « pommes noires ».

Impact organoleptique sur le produit fini

Les résultats des analyses sensorielles (tests triangulaires et profils sensoriels effectués par jury expert de l’ADRIA Normandie) réalisées sur 3 années d’observations n’ont pas permis de conclure sur la mise en évidence significative de différences organoleptiques liées à l’état sanitaire des fruits employés.

Cela signifie que l’état sanitaire ne modifie pas le potentiel organoleptique du fruit lors d’une transformation par la technologie cidre « pilote ». Néanmoins, dans le cas d’une transformation en atelier cidricole classique, c’est à dire en l’absence de purge de la flore initiale du moût et d’ensemencement contrôlé, il est vraisemblable que la flore issue des fruits (flore positive et flore d’altération) puisse influer sur les caractéristiques aromatiques du produit fini. Les risques de déviations organoleptiques seront à priori plus importants sur moûts issus de fruits altérés.

En complément de ces travaux, une recherche de molécules liées à des goûts moisis-terreux rencontrés dans le vin (géosmine, 2-méthyl isobornéol (MIB) et 2-isopropyl-3-méthoxy pyrazine (IPMP)) a été réalisée sur des moûts issus de différents états sanitaires. Les résultats obtenus montrent que les concentrations relevées en géosmine et en 2-méthylisobornéol (MIB) sont inférieures aux seuils de perception dans le vin de ces molécules. La concentration de ces molécules étant partiellement réduite lors de la fermentation, elles ne doivent pas poser de problèmes particuliers pour le cidre.

Conclusion

Le premier enseignement qu’on peut tirer de ces travaux est que les seuls itinéraires de récolte qui permettent de s’affranchir sur une longue durée de l’impact négatif de la maturation post-récolte (dégradation de l’état sanitaire) sont la cueillette des fruits et la récolte sur réceptacle. Ces techniques sont intéressantes dans le cas où un délai entre récolte et transformation est souhaité ou subi. Dans le cas où le délai entre récolte est transformation est plus réduit (< 7 jours), les modes de récoltes utilisés sont utilisables sans trop de risque vis à vis du risque patuline.

Sur le plan organoleptique, même si les résultats acquis ne mettent pas en évidence d’impact de l’état sanitaire en cidre « pilote », il est souhaitable, d’après les mesures microbiologiques effectuées sur moût, d’effectuer un tri sérieux des fruits pour limiter l’incorporation de microorganismes d’altération.

Etude 2 : Evolution des caractéristiques des pommes à cidre autour de la récolte

Contexte

La composition chimique et les propriétés physiques des pommes peuvent influencer fortement les étapes de fabrication du cidre. Une meilleure connaissance de l’évolution de ces caractéristiques, à l’approche de la maturité et durant le stockage des fruits avant pressage, doit donc permettre de mieux maîtriser la qualité de la matière première et d’orienter les choix en matière de date de récolte et de durée de conservation.

Organisme pilote

IFPC : Rémi BAUDUIN – remi.bauduin@ifpc.eu

Partenaires

INRA Unité de Recherches Cidricoles - Agrocampus Ouest - Institut National d’Horticulture et de Paysage - INRA - UMR Genhort (Génétique et Horticulture)

Durée du programme

3 ans (2006-2008)

Objectifs

  • Confirmer l’incidence du degré de maturité sur le comportement des fruits à l’extraction et sur les caractéristiques des jus
  • Tenter de regrouper les variétés les plus utilisées en groupes de comportement à l’approche de la récolte et pendant la maturation post récolte
  • Proposer des indicateurs de maturité adaptés au contexte cidricole

Résultats

Constitution de groupes variétaux

Quatre groupes de comportement distincts ont été constitués (cf. tableau ci-dessous), les groupes C et D étant les plus proches. On peut noter que les 4 variétés de ces 2 groupes sont des variétés aigres/acides.

 Groupe A

 Groupe B

 Groupe C

 Groupe D

 

 Douce Moen

 Douce Coetligné

 

 Avrolles

 Locard Vert    

 

 Petit Jaune     

 Judor

 Kermerrien

 Fréquin Rouge    

 Binet Rouge

 Bedan

 Ces 4 groupes se distinguent nettement par 7 critères : la déshydratation des fruits, la régression de l’amidon, l’évolution de la masse volumique, le rendement d’extraction, la rigidité, l’évolution des teneurs en azote totale et en pectines solubles.

La teneur en sucre présente toujours une augmentation en maturation post-récolte, mais d’intensité variée selon les groupes variétaux ; pour les variétés des groupes B et C, l’augmentation est significative mais faible, pour les variétés des groupes A et D elle est plus marquée. Ces fortes augmentations peuvent s’expliquer par une déshydratation importante pour le groupe A et une forte régression de l’amidon (transformation en sucres solubles) spécifiquement pour le groupe D.

Le rendement d’extraction évolue peu au cours de la maturation sur l’arbre, c’est à dire que la sous-maturité a peu d’influence sur le rendement d’extraction. En revanche, la maturation post-récolte induit une chute de ces rendements. Cela peut s’expliquer à la fois par la chute de la rigidité du fruit, mais aussi par un couplage avec une déshydratation dans le cas des variétés du groupe A.

Conclusion

Cette étude montre que les variétés n’ont pas le même comportement autour de leur date de récolte. Elle met en évidence qu’il est possible d’optimiser un ou plusieurs critères en contrôlant mieux l’état de maturité ou de maturation post-récolte des fruits. Cette optimisation va permettre d’influer soit sur la qualité ou stabilité des produits finis (azote, pectines, sucres), soit sur des paramètres économiques (rendement d’extraction).

Dans un contexte de production, ces résultats doivent également être intégrés avec d’autres paramètres que sont l’état sanitaire de la récolte, la présence de flores d’altération, le risque patuline.

Financement



 

Fiche mise à jour le 25 avril 2012.

 
 
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